En matière de droit des procédures collectives, pendant longtemps la législation impliquait des sanctions automatiques pour l’entrepreneur en faillite, indépendamment du fait qu’il soit fautif ou non.
C’est par une loi du 13 juillet 1967 (n°67-563) qu’a été introduite la distinction entre le sort du débiteur et celui de l’entreprise.
Préalablement à toute étude des sanctions, il convient de revenir sur la notion de « faute », élément déterminant pour engager la responsabilité du dirigeant.
En effet, seul le fait pour le dirigeant d’avoir eu des comportements ayant conduit à la cessation des paiements et l’ouverture de la procédure collective peut engager sa responsabilité, et donc entraîner des sanctions. On parle couramment de « faute de gestion ».
Les règles qui régissent la responsabilité du dirigeant dans le cadre d’une procédure collective mettent en évidence trois principales sanctions.
Le comblement de passif pour insuffisance d’actif
Ce type de sanction a pour conséquence d’engager le patrimoine du dirigeant pour pallier une faute de gestion de sa part, ayant entraîné l’aggravation de l’insuffisance d’actif.
Un tel mécanisme est prévu à l’article L 651-2 alinéa 1 du Code de commerce : « Lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ».
Cette action doit être engagée par le liquidateur intervenant à la procédure qui doit obligatoirement apporter la preuve de l’existence d’une faute de gestion, ainsi que son lien de causalité avec l’augmentation de l’insuffisance d’actif.
Bien qu’il n’existe pas de liste exhaustive, les Tribunaux retiennent régulièrement à ce titre :
- Une déclaration tardive de la cessation des paiements (Cass. com 30/11/1993 n°91-20.554);
- Une imprudence dans la gestion du patrimoine de la société (Cass. com 25/11/2008 n°07-11.549) ;
- Une rémunération abusive (Cass. com 31/05/2016 n°14-24.779) ;
- Le fait pour le dirigeant de se désintéresser des affaires de la société en s’abstenant de sa gestion (Cass. com 07/10/2020 n°19-14.291)
Une distinction est toutefois faite avec la seule négligence du dirigeant par la loi du 9 décembre 2016 (n° 2016-1691) qui prévoit qu’« en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée».
En cas de condamnation, le dirigeant devra verser aux créanciers, la somme permettant de combler tout ou partie de l’insuffisance d’actif.
La faillite personnelle et l’interdiction de gestion
Cette sanction vise à interdire au dirigeant fautif et ayant fait l’objet d’une procédure collective, de gérer, de diriger, d’administrer ou d’avoir le contrôle total ou partiel, d’une entreprise.
Cette sanction est prévue par l’article L 653-4 du Code de commerce qui liste les fautes susceptibles d’entraîner une telle sanction :
- Avoir disposé des biens de la société comme s’il s’agissait de biens propres (Cass. com 08/01/2020 n°18-17.039) ;
- Avoir effectué, sous couvert de la société et en masquant ses agissements, des actes de commerce dans un intérêt personnel ;
- Avoir utilisé les biens ou crédits de la société pour un usage contraire à l’intérêt de cette dernière et à des fins personnelles afin de favoriser une autre entreprise (Cass. com 21/10/2020 n°19-14.138) ;
- Avoir poursuivi de manière abusive et dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait que conduire à la cessation des paiements (Cass. com 17/06/2020 n°18-23.088) ;
- Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif ou avoir frauduleusement augmenté le passif de la société ;
Le Tribunal peut fixer cette interdiction pour une durée de quinze ans et de l’assortir d’une interdiction d’exercer une fonction publique élective pour une durée de cinq ans.
Le délit de banqueroute
Comme son nom l’indique, il s’agit d’une sanction pénale où le dirigeant encourt une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
L’article L 654-2 du Code de commerce régit cette sanction lorsque les faits suivants commis par le dirigeant peuvent être prouvés :
- Avoir effectuer des achats en vue d’une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds pour éviter ou retarder l’ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire (Cass. crim 12/03/1998 n°96-85.739);
- Avoir détourné ou dissimulé une partie ou la totalité de l’actif (Cass. crim 05/08/1998 n°97-84.431);
- Avoir augmenté le passif de manière frauduleuse (Cass. crim 13/03/2002 n°01-82.868);
- Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables ou s’être abstenu de tenir toute comptabilité lorsque des textes l’obligeaient (Cass. crim 06/12/1993 n°93-81.475) ;
- Avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière (Cass. crim 17/11/2004 n°03-82.657);